Test : Verlet Swing sur Nintendo Switch

Verlet Swing

Genre : Action, Adresse, Scoring, Die and Retry
Langues : Allemand, Anglais, Espagnol, Français, Italien, Japonais, Coréen, Néerlandais, Portugais, Russe, Chinois
Développé par Flamebait Games
Édité par Digerati Distribution
Sortie France : 14/06/2019
Prix : 14,99€ sur l’eShop (promo : 11,99€ jusqu’au 13/07/19)
Taille : 1231,03 Mo
Joueurs : 1
Age minimum : 7

Site Web Officiel

Étrangement (ou non?), le courant surréaliste a souvent inspiré les développeurs de jeu-vidéo : peut-être son non-sens incarne-t-il un terrain de jeu idéal pour les voyageurs adeptes d’un dépaysement total, voire d’une complète perte de repères ? Ou peut-être, tout simplement, les créateurs ont-ils tenté d’inscrire leur oeuvre au Panthéon du n’importe quoi porté en étendard, estimant que cette forme d’art, forcément immersive, se devait d’être revendiquée et partagée. En effet, le virtuel a cette qualité qu’il offre une interaction concrète avec l’abstrait. De nombreux titres s’y sont essayés et ont marqué des générations au fer rouge, non par leur réussite commerciale mais, bien souvent, par un véritable succès d’estime, forcément plus précieux : de Psychonauts à Weird Dreams, en passant par les Wario Ware de Nintendo, sans oublier les productions Suda51 tel que l’inoubliable Killer 7, les univers brillant par leur singularité se comptent sur les trente doigts d’une main. Non, vous ne rêvez pas : trente ! Et si cette dernière assertion vous trouble, vous n’êtes vraiment pas prêt pour Verlet Swing !

Dans ce titre, vous incarnez, en vue subjective, un personnage sans histoire qui doit se rendre d’un point A à un point B en se balançant d’appui en appui, tel un Spider Man sous acide. En effet, le joueur constatera rapidement qu’il n’est nullement question de tisser sa toile de buildings en hélicoptères, mais plutôt de Moaï en canard, part de pizza en cuvette des toilettes, de fil en aiguille et de “C’est absurde !” en “Mais pourquoi ?!”. Forcément, les pérégrinations de notre avatar seront rythmées par le tempo d’un cruel chronomètre, lequel décidera ou non de lui octroyer des étoiles qui jaugeront sa réussite. Et autant brandir immédiatement un panneau préventif : vous êtes en présence d’un die and retry à la difficulté aussi folle que l’univers brossé par les développeurs !

Le gameplay du soft est à la fois simple d’accès et exigeant : en réalité, il requiert une maîtrise qui ne s’acquiert que par la pratique (l’apprentissage par l’échec !) et l’obstination. La gâchette droite permet au joueur de brandir sa toile et de se balancer en suivant une trajectoire rectiligne, tandis que la gâchette gauche lui accorde des mouvements horizontaux, même s’il conviendra, pour les apprivoiser, de composer avec la vitesse et l’inertie du personnage lancé à toute vitesse dans une course au-dessus du vide. Et c’est presque tout ! La visée s’effectue aux joystick, permettant d’aligner le curseur avec le point d’appui convoité. Il faut tout de même savoir que les trajets parcourus s’effectuent d’une traite et qu’il n’est nullement possible de faire une pause sur l’un des obstacles jonchant notre route, tout contact avec un objet menant l’acrobate au point de départ ! (Et ne rêvez pas : les checkpoints sont inexistants !)

Toutefois, ce gameplay qui a fait ses preuves sur PC (merci, petite souris !) a bien du mal à s’affranchir du relatif inconfort d’une visée aux joysticks. Ainsi, il arrive souvent que, dans la précipitation, notre personnage s’agrippe à un objet non convoité, situé plus loin, et que la longueur de la toile nous fasse, fatalement, racler sauvagement le sol ! En outre, et c’est davantage un souci de level-design, la plupart des niveaux sont assez étriqués et obligent l’homme-araignée à effectuer de violentes rotations au cœur de couloirs alambiqués. Forcément, le game over n’est jamais très loin, et le joueur a rarement le temps d’entrevoir l’issue qu’il devait emprunter pour parvenir à la fin du circuit. Assez rageant car ce système implique une foultitude d’essais successifs pour espérer deviner la suite du parcours, avant même d’espérer le terminer. Ce constat n’englobe heureusement pas l’intégralité des niveaux proposés par le titre, et quelques univers plus ouverts sont proposés, autorisant divers cheminements qui requièrent plus ou moins de technique.

Artistiquement, le jeu est une petite merveille, et offre au joueur un dépaysement total. Cinq univers, composés de vingt niveaux chacun, lui sont proposés, disposant d’une ambiance très particulière même s’ils conservent une pure folie comme liant. Un travail tout particulier a été porté sur les couleurs et les contrastes, ce qui nous plonge immédiatement dans une atmosphère psychédélique. Il est cependant regrettable de ne pas toujours pouvoir profiter pleinement du voyage, tant la difficulté nous rappelle constamment que nous sommes en présence d’un jeu-vidéo exigeant ; et l’on se surprendra parfois à se désespérer d’un niveau invraisemblablement retors qui nous empêche d’apprécier la suite de l’expérience. À ce sujet, peut-être aurait-il été plus sage de proposer les cinq premiers niveaux de chaque univers, plutôt que d’obliger le joueur à les parcourir dans l’ordre ? Aucune main n’est tendue, et si vous êtes bloqués dans une run, c’en est fini de vous : aucun mode “facile” ne viendra à votre rescousse. Enfin, et toujours à propos de la réalisation graphique, il faut noter qu’en mode portable, la résolution du titre n’est pas très élevée et qu’un certain crénelage est à déplorer, mais l’inventivité des tableaux visités vous fera vite oublier ce défaut.

Musicalement, Verlet Swing est une réussite. La bande-son, s’inscrivant dans le genre de la vaporwave, a été écrite et produite par Viktor Zryd. Transcendante et envoûtante, elle accompagne notre acrobate dans ses envolées acidulées, et sait se montrer tantôt rythmée, tantôt plus effacée, comme le serait un cœur d’artiste en phase d’inspiration. Ce choix musical cadre non seulement avec l’ambiance graphique, mais permet aussi de canaliser la frustration du joueur face à la difficulté exacerbée du titre. Seul bémol : les pistes manquent de variété, et la lassitude peut poindre à l’horizon, surtout lorsque l’on tente pour la cinquantième fois d’agripper ce fichu dauphin permettant d’atteindre la prochaine bouée en évitant une nuée de bulles lévitant dans le vide intersidéral !

Fort de ses cent niveaux redoutables, Verlet Swing a de sérieux arguments pour tenir le joueur en haleine. Malgré tout, ce dernier devra témoigner d’une patience à toute épreuve, car non seulement l’accès au point d’arrivée est un luxe monnayable en habileté, mais les scores attribués à ses prestation sont d’une sévérité sans égale ! Aussi, le seul moyen de progresser étant de réussir, il est possible que certains joueurs, moins acharnés, abandonnent l’expérience sans en voir le bout. C’est assez dommage ! Heureusement, les amateurs de scoring et de speed-run ont, quant à eux, trouvé LA perle rare, car comme évoqué précédemment, la maîtrise d’un gameplay aussi simple que sévère est réellement propice à la rivalité chronométrée !

Au rang des déceptions, on évoquera enfin la disparition totale du créateur de niveaux, pourtant disponible sur le Steam WorkShop. Et même si l’on peut aisément comprendre que la maniabilité console aurait rendu la personnalisation moins accessible et instinctive, nul doute que les créateurs les plus imaginatifs auraient su s’approprier les outils mis à leur disposition pour transposer leurs délires psychiques en expérience vidéo ludique.

D’une élégance insensée, et forcément surprenant dans sa conception (ou dans l’absence de logique de sa conception !), Verlet Swing s’avère être une oeuvre surréaliste de grande qualité. Visuellement et musicalement, c’est un voyage débridé qui ne peut laisser indifférent. Toutefois, la difficulté rebutante du titre, qui rappelle constamment qu’il s’agit avant-tout d’un jeu-vidéo et non d’un tableau à contempler sereinement, le destine avant-tout aux amateurs de speedrun et de die and retry. On aurait souhaité pouvoir déambuler plus librement dans les niveaux composant le soft, ou au moins opter pour une difficulté amoindrie, autorisant par exemple trois collisions avec le décor ou implémentant des checkpoints. Ce n’est pas le cas, et il faudra composer avec l’extrême exigence des développeurs pour mériter de voguer de pizzas en poissons volants ! Mais après tout : un grand pouvoir implique une grande habileté !

Test réalisé par Yorick sur une version offerte par l’éditeur
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